Free Lance *

(* Edition épuisée)

Jean Rigaud a fait en 1976 une série de photographies dans un lac de barrage momentanément hors d’eau, puis elles lui ont inspiré un poème. Le terrain obsessionnellement répétitif induisait un sentiment d’enfermement, qui, à son tour, engendrait une aspiration à un aboutissement. D’où s’est formée dans son esprit la notion de quête initiatique telle que l’ont pratiquée les légendaires chevaliers errants du Moyen-âge. Dès lors les images désolées d’une mort sans sépultures se mettaient à vivre une vie inattendue que seul le poète pouvait exprimer et nous rendre perceptible.

Free-Lance propose un sens à ce qui, aux yeux de tout autre qu’un poète visionnaire, risquerait d’apparaître comme morne désert ou épaves inconsistantes. « Propose » sans imposer, car l’interrogation inhérente à la quête subsiste jusqu’à la fin. Et si cette fin se présente comme la fin d’un cycle, elle est aussi ouverture sur une éventuelle poursuite de la quête autrement.

Entre temps l’auteur aura introduit une cohérence dans un cheminement parmi des lieux et des êtres que leur étrangeté empêche de tenir pour un reportage : ou du moins, si ce doit être quand même une forme de reportage, c’est dans un monde fantastique qu’il nous transporte puisque, arpenteur d’un territoire perdu, il nous emmène en fait sur les sentiers d’un voyage intérieur.

Il ne restait apparemment à l’éditeur de ce livre d’artiste qu’à typographier les textes à la main et à tirer les photographies sur un papier à texture veloutée pour que le bibliophile soit comblé; mais il a voulu que soient révélés au lecteur les tenants et aboutissants de l’entreprise, afin que soit encore plus patent le lien inextricable entre l’homme et la nature. Cette tâche a été accomplie par Michel Leroux dans une éclairante introduction.

Le point de vue du typographe recueilli par Françoise Gouyou-Beauchamps:
Michael Caine parle de la magie de l’univers de Jean Rigaud dont il a respecté les volontés formelles pour la mise en page de Free Lance. Une composition d’inspiration mallarméenne a guidé son travail :« La typographie s’étoile à travers la page en constellations de lettres juxtaposées dans des formes aléatoires rythmées, trouvées à partir du manuscrit laissé par Jean Rigaud et des indications données par l’éditrice, explique-t-il. J’ai proposé des lignes plus en paysages que le manuscrit original. » Il enchaîne à propos du choix du caractère Méridien demi-gras d’Adrian Frutiger, création de 1957 : « Il répond au noir saturé des images imprimées au jet d’encre. Le Méridien est un caractère glyphique et rentre bien dans le cadre du livre par son acuité et sa ressemblance avec les fissures de la terre et du sable compacté de cet endroit déserté. Les pattes triangulaires sont très lapidaires, on est dans l’usure de la pierre très dure, le temps qui balafre les murs, la pierre résiste mais les failles apparaissent dans ce matériau éternel. Le Méridien, c’est le ciseau qui va droit dans sa cible, la pierre monumentale. » Avec cette métaphore, Michael Caine confirme que le choix typographique est à la fois une histoire de savoir et de compréhension intuitive du projet artistique.

La publication Free Lance est à ce jour épuisée mais Les Editions La Féline sont heureuses de vous présenter leur premier Ebook avec Passage en Terre Gaste sa version numérique.

Description

La plupart du temps, un ‘livre d’artiste’ se constitue à partir d’un texte qu’un artiste illustre ensuite ; ou bien un artiste visuel recherche un écrivain susceptible de rédiger un texte faisant écho à son dess(e)in. Ou encore un éditeur estime pouvoir associer deux créateurs qui ne se connaissent pas et n’ont peut-être même pas de vision commune. Le cas de Free Lance est autre: l’artiste et le poète ne font qu’un.

Caractéristiques :

  • ISBN : 978-2-9534946-7-9
  • édition de tête
  • ouvrage édité en deux livrets-accordéon pliés
  • format: 24 x 24 cm
  • étui: revêtu de papier à la cuve
  • année: 2011
  • 850 € franco de port

Le contenu :

  • 20 photographies originales reproduites au jet d’encre pigmentaire
  • sur Vélin d’Arches Muséum 260 gr
  • par le studio Franck Bordas à Paris
  • 20 textes inédits
  • typographiés au plomb mobile
  • en Méridien demi-gras corps 16
  • par Michael Caine à l’Atelier de la Cerisaie à Paris
  • le tirage comporte 3 exemplaires hors-commerce chiffrés de A à C et 15 exemplaires numérotés de 1 à 15.

Spécificités :

  • introduction de Michel Leroux: en Méridien italique corps 14
  • les planches argentiques originales sont conservées au Cabinet des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque Nationale sous la cote EP2-551-PET-FOL.

Bibliographie :

  • Arts et Métiers du Livre N°288 p. 87
  • M. Leroux, « Tout n’est pas vu », Mémoire d’Obiou, n° 17, pp. 116-122